Législatives au Royaume-Uni : des conservateurs impopulaires et en bout de course

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Alors que la campagne électorale est lancée, le Premier ministre conservateur Rishi Sunak semble promis à une défaite inéluctable. Après 14 ans au pouvoir, les « Tories » paraissent épuisés et divisés. L’inflation et le déclin des services publics de santé cristallisent le mécontentement des classes moyennes et populaires.

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Pas de retour en arrière possible. Le Parlement britannique a été dissous jeudi 30 mai à la demande du Premier ministre conservateur Rishi Sunak, ouvrant la voie à des législatives anticipées prévues pour le 4 juillet.

« Ça semble un peu précipité. Mais qu’auraient fait les conservateurs six mois de plus au pouvoir ? », se demande Thibaud Harrois, maître de conférences en civilisation britannique contemporaine à l’université Sorbonne-Nouvelle. Le chercheur estime qu’ »ils allaient droit vers une défaite ». Des législatives étaient initialement prévue en janvier 2025, mais Rishi Sunak a annoncé le 22 mai qu’il avançait la date du scrutin.

Pour certains analystes, le Premier ministre espère tirer parti d’une légère baisse de l’inflation au Royaume-Unicelle-ci n’ayant progressé que de 2,3 % en avril sur un an. Depuis le printemps 2021, le coût de la vie a pris 22 %, affectant les ménages britanniques les plus modestes, mais aussi les classes moyennes. « Rishi Sunak va sans doute en profiter pour montrer que ses politiques font effet sur l’économie et dire qu’elles commencent à payer », précise Thibaud Harrois.

Toutefois, estime le chercheur, ces élections anticipées peuvent aussi cacher « l’annonce de mauvais chiffres économiques à paraître et dont le Premier ministre ne souhaite pas porter le chapeau ».

Des Tories épuisés

Avec son annonce de dissolution, Rishi Sunak a pris ses propres troupes de court. Parmi les Tories qui se représentent, certains n’ont pas caché leur agacement d’avoir été pris au dépourvu. Steve Baker, le secrétaire d’État chargé de l’Irlande du Nord, a même maintenu ses vacances en Grèce, expliquant qu’il y préparerait sa campagne.

Après 14 ans au pouvoir, dans les rangs du parti conservateur, les parlementaires sont épuisés. Depuis 2010, cinq Premiers ministres conservateurs se sont succédés au 10 Downing Street, remportant quatre élections de suite. La dernière en date, en décembre 2019, fut un raz de marée conservateur, lorsque qu’un flamboyant Boris Johnson avait fait tomber le mur rouge travailliste du nord de l’Angleterre.

Cependant, deux crises majeures, le Brexit et le Covid, puis les scandales politiques de l’ère Boris Johnson (2019-2022) lui ont valu une hostilité croissante du public. 

Aussi, de nombreux députés ont jeté l’éponge. Sur les quelque 129 députés qui ont annoncé qu’ils ne se représenteraient pas, figurent 77 conservateurs. Un exode sans précédent pour un parti au pouvoir.

La campagne débutée depuis une semaine est donc marquée par un climat morose dans le camp conservateur. L’annonce des législatives sous une pluie battante ou par une visite à Belfast dans le quartier du Titanic, attirant inévitablement des comparaisons avec le naufrage du célèbre paquebot, dans la bouche des analystes de la vie politique britannique.

Un mécontentement grandissant

« Il y a une volonté d’alternance chez les électeurs britanniques face aux problèmes persistants que les conservateurs n’ont pas su régler. Naturellement, ils ont envie d’essayer un autre parti », commente Thibaud Harrois.

Le mécontentement à leur égard a grandi au fil des ans et devrait se manifester dans les urnes en juillet prochain, si l’on en croit les sondages. Ils placent le Labour à 45 % des intentions de vote en moyenne contre 23 % pour les Tories, laissant présager, vu le mode de scrutin à la majorité simple, une très large victoire des travaillistes.

Premier grief à l’encontre des conservateurs : la crise du coût de la vie. « Les conservateurs n’ont pas réussi à juguler l’inflation », souligne Thibaud Harrois. Et la baisse est encore trop récente pour être ressentie pleinement.

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À cela s’ajoute, le déclin des services publics et notamment le service de santé. « Les conservateurs avaient promis de trouver des solutions. De belles promesses ont été formulées au moment du Covid. Elles n’ont pas vraiment été suivies d’effet et on continue à avoir des listes d’attente très longues, par exemple pour une opération médicale, ce qui est un grand sujet de préoccupation pour la population ».

Sauver les meubles au sein du parti conservateur

Pour les Tories, la perspective d’un congrès du parti en septembre et d’une guerre fratricide pourrait elle aussi avoir précipité la décision d’avoir recours à cette dissolution afin de tout remettre à plat.

« Les conservateurs vont avoir du mal à éviter une véritable remise en question interne », présage Thibaud Harrois. « S’il y a une défaite du parti, ce qui est quand même attendu – il y aura certainement des règlements de compte. Le congrès de septembre risque d’être assez tendu ».

Le clan le plus populiste au sein du parti, à l’image de Liz Truss qui a fait un passage éclair au 10 Downing Street, pourrait en profiter pour reprendre les rênes. Rishi Sunak, lui fait office de figure centrale, à mi-chemin entre populisme et frange traditionnelle. Le résultat des élections américaines de novembre 2024 pourrait lui aussi donner du souffle au courant Truss si Donald Trump venait à remporter la victoire Outre-Atlantique.

Keir Starmer, le nouveau Tony Blair ?

En attendant, ce sont les travaillistes qui ont le vent en poupe depuis l’annonce de Rishi Sunak. Et l’effet de surprise n’a pas eu chez eux l’effet escompté puisqu’ils ont vite affuté leurs arguments. « Le mot d’ordre de leur campagne est ‘le changement’ et leur principal atout est Keir Starmer« , raconte Thibaud Harrois, depuis Londres.

Cet ancien avocat spécialisé dans les droits humains, apparaît comme le grand favori pour prendre la tête du gouvernement. Une personnalité politique « respectée » pour sa carrière de magistrat. « Il n’est pas extrêmement charismatique, mais en tout cas, il est reconnu comme sérieux », ajoute le chercheur.

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Se plaçant sur un positionnement centriste, Keir Starmer tranche avec Jeremy Corbyn, ancien dirigeant du Parti travailliste britannique au moment de la défaite du Labour face à Boris Johnson en 2019. Lui, aspire plutôt à être comparé à Tony Blair, Premier ministre travailliste qui avait permis à son parti de reprendre la tête du pays en 1997, jusqu’en 2010. C’est ce que souhaite faire à son tour Keir Starmer.

Symbole du recentrage méthodiquement opéré par Keir Starmer depuis 2020, le Labour a même reçu cette semaine le soutien de 120 personnalités du patronat, autrefois vent debout contre le programme de Jeremy Corbyn.

Un premier débat télévisé opposant Keir Starmer à Rishi Sunak doit avoir lieu mardi soir sur la chaîne de télévision ITV.

Avec AFP

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